Les risques de la polymédication sont particulièrement élevés chez les personnes âgées. En effet, les personnes âgées sont plus susceptibles d’avoir des problèmes de santé qui nécessitent la prise de médicaments, et elles sont également plus susceptibles d’avoir des effets secondaires médicamenteux.
I. Epidémiologie de la polymédication:
L’épidémiologie de la polymédication, qui fait référence à l’usage concomitant de plusieurs médicaments par un individu, est un phénomène croissant, notamment chez les personnes âgées, en raison de la prévalence accrue de multiples conditions chroniques dans cette tranche d’âge.
En effet, Selon une étude de l’Organisation mondiale de la santé, la prévalence de la polymédication chez les personnes âgées de 65 ans et plus est de 40 % dans les pays développés. Cette prévalence est encore plus élevée dans certains pays, comme le Japon (70 %) et les États-Unis (50 %).
Et si cette pratique est souvent liée à une augmentation des consultations médicales, des hospitalisations et des dépenses de santé. Il est crucial de surveiller et d’étudier les tendances épidémiologiques de la polymédication afin de mettre en place des stratégies de gestion appropriées pour minimiser les risques associés et promouvoir l’utilisation rationnelle des médicaments.
II. Facteurs contribuant à la polymédication:
Nous pouvons regrouper ces facteurs en quatre catégories générales pour mieux comprendre et gérer les aspects contributifs de la polymédication chez les personnes âgées :
A. Facteurs Liés au Système de Santé:
B. Facteurs Liés aux Comportements des Patients:
C. Facteurs Médicaux et Cliniques:
D. Facteurs Liés à la Gestion des Soins:
Ces catégories offrent une vue d’ensemble des différentes facettes qui contribuent à la polymédication, mettant en évidence l’importance d’une gestion et d’une coordination proactives dans le soin des personnes âgées.
III. Risques Associés à la Polymédication:
A. Interactions médicamenteuses:
Les interactions médicamenteuses sont un risque grave associé à la polymédication. Elles peuvent entraîner des effets secondaires graves, voire mortels. Les interactions médicamenteuses peuvent se produire entre deux ou plusieurs médicaments pris par un patient, ou entre un médicament et un aliment ou une boisson.
Il existe de nombreux facteurs qui peuvent augmenter le risque d’interactions médicamenteuses, notamment :
Pour réduire le risque d’interactions médicamenteuses, il est important d’être vigilant et de consulter un médecin ou un pharmacien avant de prendre de nouveaux médicaments. Il est également important de suivre les instructions du médecin ou du pharmacien concernant la prise de médicaments.
B. Effets secondaires et complications:
Les effets secondaires des médicaments chez les personnes âgées constituent un domaine de préoccupation majeur dans le cadre de la gestion de la santé des séniors.
Avec l’âge, l’organisme connaît des changements physiologiques qui peuvent altérer l’absorption, la distribution, le métabolisme et l’excrétion des médicaments, augmentant ainsi le risque d’effets indésirables.
Il est donc essentiel pour les professionnels de santé de procéder à une évaluation minutieuse et régulière des régimes médicamenteux des seniors, en tenant compte des possibles effets secondaires et en éduquant les patients et leurs aidants sur les signes à surveiller.
Cette évaluation doit être accompagnée d’un dialogue ouvert où les patients peuvent signaler tout effet secondaire ressenti, permettant ainsi des ajustements opportuns dans le régime de médication.
C. Risque accru d’hospitalisation:
Un suivi inadéquat de la polymédication peut augmenter le risque d’hospitalisation chez les personnes âgées de plusieurs façons.
Premièrement, un suivi inadéquat peut entraîner des erreurs de prise de médicaments. Cela peut inclure la prise de médicaments incorrects, la prise de médicaments à la mauvaise dose ou la prise de médicaments au mauvais moment. Ces erreurs peuvent entraîner des effets secondaires graves, voire mortels.
Deuxièmement, un suivi inadéquat peut entraîner des interactions médicamenteuses. Cela se produit lorsque deux ou plusieurs médicaments interagissent entre eux de manière négative. Les interactions médicamenteuses peuvent entraîner une augmentation des effets secondaires, une diminution de l’efficacité des médicaments ou même un décès.
Troisièmement, un suivi inadéquat peut entraîner une non-adhésion au traitement. Cela se produit lorsque les patients ne prennent pas leurs médicaments comme indiqué. La non-adhésion au traitement peut entraîner une aggravation des conditions médicales et une augmentation du risque d’hospitalisation.
D. Impact sur la qualité de vie:
La polymédication peut avoir un impact négatif sur la qualité de vie des patients. Cet impact peut se manifester à plusieurs niveaux :
Selon une étude réalisée en France en 2018, la polymédication était associée à une diminution de la qualité de vie des patients, notamment sur le plan physique, psychologique et social. L’étude a montré que les patients polymédiqués étaient plus susceptibles de se sentir fatigués, de souffrir de douleurs et de troubles du sommeil. Ils étaient également plus susceptibles de se sentir déprimés et d’avoir des difficultés à se concentrer.
Pour réduire l’impact de la polymédication sur la qualité de vie, il est important de limiter le nombre de médicaments prescrits. Cela passe par une meilleure coordination des soins entre les différents professionnels de santé, et par une meilleure information des patients sur les risques et les bénéfices de la polymédication.
E. Coût économique:
La polymédication peut avoir des conséquences néfastes sur la santé, mais elle peut également avoir un impact économique important qui se manifeste à plusieurs niveaux :
Selon l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES), le coût économique de la polymédication en France est estimé à 10 milliards d’euros par an. Ce coût est principalement lié au coût des médicaments, mais il comprend également le coût des consultations médicales et des hospitalisations.
Pour réduire le coût économique de la polymédication, il est important de limiter le nombre de médicaments prescrits. Cela passe par une meilleure coordination des soins entre les différents professionnels de santé, et par une meilleure information des patients sur les risques et les bénéfices de la polymédication.
IV. Conclusion:
Une meilleure gestion de la polymédication permettrait de réduire les risques pour la santé des patients, d’améliorer leur qualité de vie et de limiter les coûts de la santé.
Cette gestion est donc essentielle pour réduire ces risques. Cela passe par une meilleure coordination des soins entre les différents professionnels de santé, une meilleure information des patients et une utilisation plus judicieuse des médicaments.
Titulaire d’un Doctorat en Médecine et d’un CEC de médecine d’urgence et de catastrophe avec une expérience de cinq années en tant qu’urgentiste et onze années en tant que médecin généraliste au Service de Médecine Interne et de Gériatrie au sein d’un hôpital universitaire. Dévouée à la prévention, au diagnostic et au traitement des maladies chroniques chez les personnes âgées.